Les 27 et 28 mars dernier, Paris a accueilli le Sommet sur la nutrition pour la croissance. Un rendez-vous mondial d’envergure visant à renforcer les engagements en faveur de la nutrition. Invitée à ce sommet, la Guinée a pris huit engagements majeurs, dont la promotion de l’allaitement maternel, un enjeu primordial pour la santé des nouveau-nés et la réduction de la mortalité infantile.
L’allaitement maternel est aujourd’hui au cœur de la stratégie nationale de santé familiale. « Environ 95,7% des enfants de moins de deux ans sont allaités au sein, ce qui montre que la pratique est largement répandue », explique Dr Djénè Fadima Kaba, directrice nationale de la Santé familiale et de la Nutrition au ministère de la Santé et de l’Hygiène publique. Elle précise toutefois que « la prévalence de l’allaitement exclusif jusqu’à six mois reste faible, avec un taux national de 43,7% ».
La Guinée, dit-elle, s’aligne sur les recommandations de l’OMS en faveur de l’allaitement exclusif pendant les six premiers mois, à travers « la mise en place de cadres réglementaires, la promulgation prochaine du Code international de commercialisation des substituts du lait maternel pour limiter la publicité des laits artificiels, et la promotion des hôpitaux Amis des bébés qui encouragent l’allaitement dès la naissance et le contact peau à peau ». Et d’ajouter : « Nous mobilisons également les leaders communautaires, les groupements féminins et les ONG locales pour sensibiliser sur les bienfaits de l’allaitement ».
Une stratégie qui met les communautés au cœur du dispositif
Docteure Hawa Sacko, spécialiste en nutrition au bureau de l’UNICEF en Guinée, met l’accent sur le rôle des communautés. « Nous accompagnons les mamans dans les communautés à travers le renforcement des capacités des groupements de femmes. Ce sont elles les piliers des foyers. Grâce aux boîtes à images, elles apprennent comment allaiter un enfant de 0 à 6 mois et comment procéder à la diversification alimentaire. Elles deviennent ainsi des relais efficaces dans la promotion de l’allaitement », explique-t-elle.
En outre, elle insiste sur l’importance de cette pratique. « L’allaitement maternel demeure l’élément clé de la survie de l’enfant. C’est le moyen le plus sûr, c’est aussi le premier vaccin de l’enfant », rappelle la spécialiste.
Mais plusieurs freins persistent. « Lorsqu’un enfant n’est pas allaité de façon continue, il risque de souffrir de malnutrition, de carences en vitamine A et d’être exposé à des pathologies graves », souligne Dr Sacko qui identifie comme obstacles l’usage de talismans issus de certaines traditions, l’ignorance, ou encore l’introduction précoce d’aliments solides. « Certaines mères commencent à nourrir l’enfant dès le deuxième mois, pensant bien faire », regrette-t-elle.
Le manque d’accompagnement familial est également un facteur. « Les belles-mères ou sœurs peuvent inciter à limiter l’allaitement, parfois pour des raisons de fertilité. Certains pères accompagnent activement les mères, mais beaucoup restent à sensibiliser sur l’intérêt de cette pratique », explique la spécialiste.
Une priorité de santé publique
L’allaitement maternel est une priorité de santé publique en Guinée. Il permet de :
- Réduire la mortalité infantile ;
- Renforcer le système immunitaire grâce aux anticorps transmis de la mère ;
- Améliorer la nutrition et la croissance de l’enfant ;
- Prévenir la malnutrition aiguë et le retard de croissance.
Pour améliorer les taux d’allaitement, plusieurs solutions sont proposées :
- Mener des campagnes d’information dans les médias et au sein des communautés ;
- Intégrer l’allaitement dans les programmes scolaires et former les sages-femmes ;
- Améliorer les conditions de travail des mères, étendre les congés de maternité (qui sont actuellement de 14 semaines alors qu’elle besoin d’au moins 6 pour assurer l’allaitement maternel exclusif) et introduire les congés de paternité (pour le papa) ;
- Créer des espaces d’allaitement dans les lieux de travail.
En Guinée, seulement un enfant sur quatre est mis au sein dans l’heure suivant sa naissance. Et seuls 43,7% des enfants de moins de six mois bénéficient d’un allaitement maternel exclusif. Pourtant, cette pratique simple et naturelle demeure l’un des moyens les plus efficaces pour sauver des vies.
Kadiatou Bachir