Planification familiale : jusqu’à quel niveau le consentement du partenaire est nécessaire ?

En Guinée, nombreuses sont ces femmes au foyer qui ont du mal à utiliser des contraceptifs. Elles sont partagées entre envie de continuer à enfanter pour plaire souvent à la belle-famille et peur de créer des tensions. Ce qui les expose parfois à des grossesses à risques. Mais certaines optent pour une planification familiale parfois sans l’aval de leurs conjoints.

Mariée et mère de trois enfants, Valérie* est en couple depuis plus de cinq ans avec François*. Elle a opté pour la planification pour des raisons personnelles sans consulter son compagnon. Une décision qui a failli lui coûter son foyer. « J’ai pris la décision il y a peu parce que ma petite sœur utilisait cette méthode et ça fonctionnait correctement. L’autre raison, je vis avec mon homme sans être mariée officiellement, même le mariage traditionnel n’a pas été fait entre nous. Je suis venue vivre avec lui dès ma première grossesse et c’est ainsi qu’on a continué jusqu’à aujourd’hui (…) Seulement, quand mon compagnon a découvert la carte de planification, il s’est énervé et a mis mes affaires dehors. Il a fallu que mes parents et les voisins demandent pardon pour que je retourne à la maison. Je ne l’ai pas informé, parce que la dernière raison formulée ne l’aurait pas plu même si c’est vrai », raconte la jeune femme.

La décision d’opter pour une moyen contraceptif n’a pas plu à François car, dit-il, il n’a pas été associé. Mais la jeune femme pensait avoir son consentement tacite. « Il m’a pourtant aidé à avorter une grossesse après la naissance de notre 3e enfant justement pour espacer les naissances mais aussi préparer l’avenir de ceux que nous avons. Peut-être que si je lui avais dit par rapport à la contraception, il n’aurait pas refusé. Mais j’ai décidé de choisir seule parce que ça me concerne d’abord », se justifie-t-elle.

Dans la plupart des couples, comme celui de Valérie, des jeunes femmes utilisent des moyens contraceptifs souvent sans l’aval de leurs partenaires. Que ce soit pour des corrections (se faire planifier pour qu’après le retrait du contraceptif on soit plus fertile, ndlr), pour l’espacement des naissances ou même pour la simple envie de ne pas encore avoir des enfants. Bien que salutaire, la planification entraîne souvent des problèmes dans certains foyers.

Toutefois, à d’autres occasions, la méthode de planification est imposée aux femmes par des médecins qui les assistent pendant leurs grossesses. Approché par Ledjely.com, un soignant qui a gardé l’anonymat, en service à Dubréka, nous a confié avoir fait planifier récemment trois femmes ayant de nombreux enfants (multipares), sans obtention préalable du consentement de leurs maris. Il justifie ses actes par l’urgence de sauver des vies. Selon lui, sa décision de planifier ou pas sans l’aval du mari dépend toujours de l’antécédent obstétrical de la patiente.

Sa première patiente est une multipare qui avait demandé une hystérectomie (enlever son utérus) pour ne plus enfanter. Sans planification, sa grossesse suivante l’aurait certainement conduite à la morgue. Cependant, sa proposition était révolue et pouvait avoir des conséquences négatives sur sa santé. Mieux, cette méthode nécessite le consentement du mari. Le médecin s’est donc limité à lui installer un dispositif intra-utérin ou stérilet. « J’ai fait une hystérectomie le dernier dimanche avant la fête [de Ramadan] chez une femme mais déjà, le médecin qui la suivait avait prévenu son mari que la grossesse de sa femme était à risque. Etant à son sixième geste, elle souffrait de diabète. Et une grossesse sur le diabète, c’était vraiment à risque (…) Quand on est ressortis du bloc, l’utérus avait perdu son élasticité. Donc, ça ne se rétractait pas, c’était devenu mou comme un chiffon », explique le médecin.

Pour la deuxième patiente, les produits pris pour calmer les douleurs et amener l’utérus à retrouver son état normal n’ont pas eu l’effet escompté. Après avoir consulté la mère de la patiente, il a alors pris la décision qui s’imposait : l’hystérectomie pour ne pas perdre la patiente. « J’ai dit à la maman les deux scénarios possibles : soit on enlève son utérus pour la sauver soit on va la perdre, en la laissant mourir. Elle a demandé de faire ce qui était meilleur et finalement on a enlevé son utérus sans informer son mari. C’est la maman qui devait s’en charger. Heureusement, son mari était déjà au courant que c’était une grossesse à risque », ajoute-t-il.

La dernière patiente a, quant à elle, eu droit à un DIU là aussi sans l’aval de son mari. Mais quand celui-ci qui est imam dans une mosquée de la ville a reçu l’information, il a eu du mal à accepter la décision de son épouse. « On avait opéré une femme qui était à son a 10e geste – elle avait déjà 9 enfants. On n’avait pas fait autre chose, on a placé le DIU. J’ai dit à la sage-femme qu’on allait placer le stérilet sans demander l’accord son mari. Car elle, elle est déjà au courant. On avait dit à la femme avant qu’on ne rentre qu’il faut qu’on la planifie, mais qu’on va le faire sans que son mari le sache. Sa prochaine grossesse était trop risquée. La sage-femme qui a essayé d’expliquer au mari la méthode a été grondée. Pour l’époux, la sage-femme s’est immiscée dans l’intimité de leur couple (…) Finalement, c’est un autre imam – un de ses amis – qui est venu le raisonner alors que nous, on avait déjà fini de planifier la femme », raconte le spécialiste. Lire la suite ici.

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