Journée internationale de la jeune fille : ces préjugés que je souhaite voir enterrés cette année…

Le 11 octobre de chaque année marque la Journée internationale de la jeune fille. Pour nous jeunes filles, c’est l’occasion parfaite de se faire entendre et comprendre nos droits. Mais est-ce vraiment le cas ? Non !

Journaliste, lors d’un récent reportage sur les perceptions que la communauté a de la planification familiale, je suis tombée sur des témoignages plutôt surprenants, en ce vingt-et-unième siècle. Les jeunes filles, malgré une forte communication de l’Etat et des partenaires, continuent de subir des remarques blessantes, des préjugés quand elles décident de recourir aux méthodes contraceptives en matière de droit à la santé sexuelle et reproductive.

Ne pas s’informer sur la planification familiale parce que nous sommes très jeunes

Le premier préjugé est celui sur l’âge de celles qui y recourent. En interrogeant une amie, elle m’a confiée avoir été témoin une fois d’une situation où une adolescente est venue demander des informations. « J’étais dans un centre de santé à Coyah pour une consultation de routine. Entretemps, j’ai vu une adolescente aller vers des infirmières et sages-femmes pour demander où on peut se planifier. Le regard qu’elles lui ont adressé en disait long. Elle a tout de même insisté puis a été orientée vers celle qui fait ce travail. Après son entretien avec la dame, il a suffi qu’elle passe le pas de la porte pour que les infirmières commencent à parler d’elle. Il y avait des critiques sur son âge, son choix et d’autres sujets qui ne concernaient qu’elle », m’a-t-elle confiée. Pourtant, jeune fille ou adolescente, active sexuellement ou pas, nous avons le plein droit de nous informer sur les méthodes contraceptives, de choisir librement notre méthode ; sans que nous ne soyons sujets de débats.

Ne pas aller acheter de préservatifs au risque d’être taxée de « fille de joie »

En Guinée, acheter des préservatifs est un peu une tâche réservée aux hommes, alors que c’est une protection pour hommes et femmes. Les quelques rares filles qui essaient en paient souvent le prix. Dans mon adolescence, je me souviens avoir côtoyé une sœur qui ne manquait pas de capote dans son sac. « Je marche avec ma protection. Comme ça, je ne risque pas d’être prise au dépourvu par un homme qui viendra me dire je n’ai pas de préservatif », racontait-elle à qui voulait l’entendre. Partie d’une bonne raison, elle a payé le prix fort. Dans la cité de Fria où je vivais alors, elle était traitée de prostituée et les parents décourageaient leurs filles à la suivre.

L’expérience montre que même avec les hommes, il y a une certaine gêne quand il s’agit d’acheter des préservatifs. On connaît tous la blague sur un jeune qui, parti acheter des préservatifs perd assez de temps dans la pharmacie, en demandant au pharmacien de prendre son temps, juste pour ne pas que les clients se rendent compte de ce qu’il est venu faire. 

« Si tu te planifies, c’est pour jouer au bordel »

Cette phrase, je l’entends régulièrement. Que ce soit des parents, des amis, des éducateurs ou même de certains prestataires de santé, la conception est unanime : une jeune fille qui se planifie souhaite commencer une vie de débauche. Sinon, pourquoi le ferait-elle, demande-t-on. 

Plus jamais ça !

Des préjugés et pensées comme ça, il en existe plusieurs que je pourrais citer mais il faut que ça s’arrête ! S’informer et se planifier pour une jeune fille ou acheter des préservatifs ne devraient nullement nous soumettre à des jugements, à des critiques ou même à des médisances en 2021. Librement, il est temps que nos voix, nos choix soient entendus, acceptés et pris en compte. Oui, il est temps que moi, jeune fille, je puisse avoir le droit d’être informée sur mes droits à la santé sexuelle et reproductive, avoir le droit de choisir la méthode contraceptive sans qu’une sage-femme, un pharmacien ou un client croisé à la pharmacie ne me dévisage sévèrement.

Ce 11 octobre 2021 – tout comme les autres jours de l’année – doit être l’occasion pour la Guinée et nos dirigeants d’appliquer nos textes, bons que sur papiers, de favoriser l’éducation des prestataires de santé, mais surtout d’intensifier la sensibilisation sur la santé sexuelle et reproductive, parce qu’en tant que jeune fille, ma voix mérite d’être amplifiée !

Elisabeth Zézé Guilavogui

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