Partir, briser le silence ou se défendre, rien de cela n’est évident pour les filles victimes de violences physiques et psychologiques. C’est un long processus pour revivre et reprendre confiance en soi. Elles sont nombreuses, chacune avec une histoire bien à elle. C’est une relation toxique, des attouchements sur le lieu de travail, du harcèlement sexuel, des abus et viol, des menaces, de la domination… Cinq filles parmi des millions d’autres nous racontent leurs histoires. 

« Je suis mariée à mon cousin violent »

Rabi, 22 ans

J’étais bien heureuse de m’unir à mon cher cousin qui m’a vue grandir. Après l’obtention de mon baccalauréat unique, le mariage en grande pompe fut célébré en famille et avec les amis. Je partis alors avec lui dans une autre ville que je ne connaissais pas. Au début ça allait bien. Puis, il est revenu un soir complètement à l’ouest. Je crois qu’il avait pris de la drogue, chose que je ne lui connaissais pas. J’étais terrifiée et c’est en refusant de coucher avec lui que je reçus ma première gifle. Depuis ce soir, je vécus un calvaire. Il revenait tard toujours aussi à l’ouest et se jetait sur moi avec des injures et des coups. La famille était au courant mais il fallait que je reste, je n’avais pas le choix : je devais être patiente, d’après eux. J’ai arrêté les cours à l’université après être tombée enceinte car mon mari ne  voulait plus que j’y aille et comme toujours je devais accepter. Aujourd’hui, ma fille a grandi et c’est devant elle que je me fais souvent battre. Je me suis enfuie une fois et mes parents m’ont ramenée de force. Je sais maintenant que c’est ici que je vais mourir, sous les coups peut-être et malheureuse ! 

« Si tu refuses, je te vire… » 

Fatou, 25 ans

C’est muni de mon diplôme de master 2 avec une mention honorable et un CV garni que j’atterris dans cette entreprise pour mon entretien d’embauche. J’étais confiante et cette entreprise était mon objectif depuis des années. Je devais avoir ce boulot. Plusieurs jeunes de mon âge étaient présents pour passer le même entretien, des jeunes hommes pour la plupart. Enfin arriva mon tour, je rencontrai alors mon boss pour la première fois. Il ne me fit pas bonne impression à cause des regards qu’ils me lançaient mais je fis fi de tout cela et mon entretien s’effectua plutôt bien. Je fus heureuse d’obtenir le boulot. J’étais fière de moi ! Cependant après trois semaines de service, mon patron commença à être beaucoup trop familier et intime avec moi. Il lui arrivait de me toucher l’épaule ou la hanche en s’adressant à moi. Cela était profondément malaisant. Je suis restée professionnelle jusqu’au jour où il me proposa d’avoir des rapports sexuels avec lui en échange d’un plus haut poste, chose que je refusai avec irritation. Il me menaça de me virer, je partis de moi même en faisant un scandale. C’était un habitué !

« Mon professeur, mon cauchemar »

Issa, 19 ans

Rentrer à l’université me fit un grand bien ! Je me sentais heureuse d’avoir relevé un si gros défis, le baccalauréat unique. Je me fis de nouveaux amis et la vie s’annonçait belle. Notre professeur d’économie était jeune et très impliqué dans les cours qu’il nous dispensait. Je l’appréciais pour cela et il m’accordait une attention particulière d’après mes amis, mais je n’y croyais pas. Je me sentais égale aux autres. Je reçus un appel de lui un soir, il prétexta une info que je devais transmettre à mes amis le lendemain. Mais plus les jours passaient plus les appels et messages devenaient récurrents. Il me faisait quelques allusions que je n’appréciais pas, je restais polie. Bientôt des rumeurs selon lesquelles lui et moi sortions ensemble furent fureur. J’étais anéantie car cela n’a jamais été le cas. Plus tard, on me pointait du doigt parce que je couchais apparemment avec mon professeur d’économie. Je décidai finalement de lui demander des comptes et il avoua que ces  rumeurs venaient de lui. J’étais furieuse et le menaçai de le dénoncer au département. Depuis ce jour, il me fit vivre un enfer. Il me mettait dehors, me donnait de mauvaises notes et m’a même devancée au département en me créant une image de traînée. Personne ne me croyait à part mes amis, ma  réputation fut ternie et je fus même victime d’agression physique. N’en pouvant plus, je changeai d’université avec l’accord de mes parents.

« Tu vas te plaindre où ? »

Hadia, 17 ans

Cela faisait un an que je sortais avec ce jeune de 23 ans. Je l’aimais bien, il était gentil. Cependant, il n’en restait pas moins mon petit ami et cela était interdit. Nous devions nous cacher pour nous voir. Il était assez jaloux et n’acceptait pas que je sois amie avec des garçons. J’acceptais cela croyant que c’était de l’amour. Je me suis éloignée de mes amis et je ne voyais que lui. Il finit par me convaincre de le rencontrer chez lui. Ce jour-là il n’était pas aussi gentil que d’habitude, son regard n’était pas le même. Il se rapprocha vite et entreprit des attouchements. Je le repoussai doucement mais il revenait toujours à la charge et bientôt s’énerva et m’obligea à ôter tous mes vêtements. Je vécus un viol pour ma première fois. Je me sentis très sale et brisée, lui semblait à l’aise. Je lui dis que j’allais  porter plainte il me rit au nez en me disant : « Tu vas te plaindre où ? » Il me rappela que je m’étais cachée pour venir chez lui et que si mes parents l’apprenaient j’étais déjà morte. Il avait raison. Je  m’enfuie de chez lui et n’en reparlai plus jamais jusqu’à aujourd’hui.  

« Tu n’es qu’une bonne à rien »

Jacqueline, 24 ans  

Je suis mariée et mère de deux enfants. Mon époux est violent, pas physiquement mais moralement. Je ne travaille pas depuis que j’ai accouché de mon premier enfant. Je suis femme au foyer. Quand j’appris qu’il me trompait, je lui en parlai et c’est là que je compris que je m’étais mariée à un inconnu. « Tu ne me sers à rien à part faire des gosses » fut la première remarque que je reçus, s’ensuivirent plusieurs autres tout aussi dégradantes. Je perdis petit à petit confiance en moi à force d’en recevoir. Désormais, il ne se cache pas et me trompe ouvertement. Je veux partir mais j’ai peur de perdre mes enfants, car mon mari est un homme influent. Je ne suis plus que l’ombre de moi-même et son esclave mentalement.

Ramata Baldé

Génération qui ose est une plateforme d’informations et de sensibilisation sur la santé de la reproduction des adolescents et des jeunes (SRAJ), de promotion de l’émancipation des femmes et de lutte contre les violences basées sur le genre. Ce projet est porté par l’Association des Blogueurs de Guinée (ABLOGUI) en partenariat avec le Fonds des Nations-Unies pour la population (UNFPA) et le ministère guinéen de la Jeunesse. Suivez-nous également sur les réseaux sociaux avec le hashtag #GquiOse.

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