Affaire M’mah Sylla : des peines allant de 1 à 20 ans de prison ferme prononcées contre les bourreaux de la jeune femme violée puis tuée

Le verdict est tombé dans l’affaire M’mah Sylla au Tribunal de première instance (TPI) de Mafanco. Les bourreaux de cette dame, victime de viols répétés avant de perdre la vie suite à des multiples opérations alors qu’elle était enceinte, écopent des peines allant de 1 à 20 ans de réclusion criminelle. La sentence a été rendue publique ce mardi 4 avril 2023 par cette juridiction de la banlieue de Conakry.

La décision du tribunal était attendue, après plusieurs mois d’audience dans cette affaire qui avait choqué l’opinion publique fin 2021. Dans son énoncé, Souleymane 1 Traoré, le président du tribunal de Mafanco, a déclaré qu’en matière criminelle et en premier ressort sur l’action publique « envoie Patrice Lamah, Daniel Lamah, Célestin Millimono et Sébory Cissé des fins de la poursuite du délit d’administration de substances nuisibles non établi à leur égard ; déclare par contre Patrice Lamah et Célestin Millimono coupables du crime de viol à eux reproché« .

Le tribunal criminel « déclare en outre Daniel Lamah, Patrice Lamah et Célestin Millimono coupables du crime de coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner et du délit d’avortement à eux reprochés ; déclare enfin Sébory Cissé coupable du délit de risque causé à autrui à lui reproché« .

Pour la répression, le tribunal condamne Patrice Lamah et Daniel Lamah à 15 ans de réclusion criminelle chacun. Sébory Cissé quant à lui écope d’un an d’emprisonnement et Célestin Millimono, qui est en fuite, est condamné à 20 ans de réclusion criminelle et un mandat d’arrêt est décerné contre lui.

Dans sa sanction, le tribunal va plus loin contre ces médecins. Patrice Lamah, Daniel Lamah et Célestin Millimono sont interdits de pratiquer l’exercice de la médecine pendant une période de cinq ans. Et il est interdit à Sébory Cissé de l’exercice de la même profession pendant une période de trois ans. 

Sur l’action civile, le tribunal reçoit la constitution de partie civile de Mamadou Bhoye Sylla, père de la défunte, « puisque régulière » et  déclare Patrice Lamah, Daniel Lamah, Célestin Millimono et Sébory Cissé responsables des préjudices qui lui sont causés. « En conséquence, les condamne solidairement au paiement de la somme d’un milliard de francs guinéens (1.000.000.000 GNF) en faveur de Monsieur Mamadou Bhoye Sylla à titre de dommages et intérêts pour toutes causes de préjudices confondus« , a annoncé le président du tribunal, Souleymane 1 Traoré, avant de préciser que sa décision est fondée sur les dispositions des articles 48, 63, 268, 262,263, 266, 243 et 83 du Code pénal; ainsi que les articles 544, 4 et 548 du Code de procédure pénale, en vigeur en République de Guinée.

Après  l’énoncé du verdict, le procureur de la République près le Tribunal de première instance de Mafanco, s’est réjoui de cette sentence. Selon lui, le juge a suivi en partie ses réquisitions. Il a rappelé que « le dossier M’Mah Sylla avait touché beaucoup de Guinéens, compte tenu du fait que ça a fait le résumé de tous les maux que peuvent subir les femmes [dans les structures médicales en Guinée]. Donc, aujourd’hui, s’il y a une telle décision, ça engage la responsabilité de tout un chacun, surtout nos médecins. Cette décision va avoir un impact au niveau de nos médecins« .

Du côté des avocats de la partie civile, c’est la joie également. Pour eux, justice a été rendue. « Aujourd’hui sera un jour gravé dans l’histoire de la Guinée. J’en suis convaincu et comme vous le savez c’est un verdict qui conseille des personnes perverses narcissiques, freiner leurs attitudes. C’est un verdict rendu dans les règles de l’art. Je suis convaincu qu’ils ne vont plus jamais récidiver ce comportement. Nous sommes très satisfaits« , a confié Me Mountagha Kobélé Keita.

Les avocats de la défense sont divisés entre joie et désespoir. Me Bernard Feindouno, un des avocats de Sébory Cissé, estime que dans cette affaire son client « n’a pas été en amont dans cette affaire. Il a été en avale. C’est celui-là qui a vu M’mah Sylla dans sa clinique la plaie était déjà ouverte. Il est intervenu en tant que médecin parce que c’est ce que la loi prévoit (…) Je suis à moitié satisfait du verdict car mon client est condamné pour délit de risques à un an d’emprisonnement et il a déjà fait plus d’un an en prison. Donc, il est automatiquement en liberté c’est en cela que je suis satisfait. Mais, pour le reste, nous allons interjeter appel parce que la condamnation de mon client au paiement solidaire de 1 milliard de francs guinéens,  on ne devait pas lui en associer puisque Dr Sébory n’a fait qu’assister comme tout autre médecin qui intervient après complications. Il ne pouvait pas aussi refuser de recevoir M’mah Sylla dans sa clinique parce que s’il n’intervenait pas, il allait être poursuivi pour non assistance à personne en danger« , a-t-il martelé.

Bhoye Barry – Contributeur de Génération qui ose

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